(f/réservée) ☾ au choix

elles le connaissent toutes depuis qu'elles ont douze ans. maksim weiss, l'un des enfants adoptés du couple weiss, grand, athlétique, mystérieux et pété de thunes : c'est lui qu'elles voulaient toutes et c'est aussi lui qui ne les regardait pas. outrées autant qu'attirées, elles ont voleté autour de lui en papillons jusqu'à finir par se sentir insultées pour de bon. en grandissant, elle s'est drapée d'une aura de fierté mêlée froideur qui lui a fait oublier maksim weiss quand il n'était pas là. s'il ne veut pas poser les yeux sur elle, c'est qu'il ne sait pas ce qu'il perd. lorsqu'il était là en soirée, elle l'observait à la dérobée. parfois, il semblait choisir une fille au hasard, son expression trahissait pour lui ce qu'il taisait : il le faisait pour le faire. elle a appris la mort de sa mère quand il a eu seize ans et l'a contemplé avec attention, car dans ce monde, on observe à la loupe les effets d'un naufrage sur un yacht flambant neuf. il semblait que rien ne pouvait atteindre maksim weiss. peu à peu, il a commencé à révéler sa part d'immondice : chaque fille de la haute qui se damnait pour lui finissait brisée, abandonnée. on a retrouvé pamela attachée à son lit dans ce qui ressemblait à une mise en scène bdsm, laissée seule sans eau ni nourriture pendant vingt-quatre heures. melanie est revenue de la frontière canadienne en maudissant maksim weiss de toute ses cordes vocales : il l'avait faite monter sur son bateau et l'avait abandonnée de l'autre côté de la rivière détroit, avec pour seule couverture sa propre veste de costume, à trois heures du matin. les anecdotes sur maksim weiss circulent comme des légendes entre les bouches gonflées d'acide hyaluronique, elles en rient tant que ça ne leur arrive pas à elles. eva se préserve, ses pensées se tournent parfois vers lui, le seul peut-être qui, au sein de leur domaine des dieux, ne semble jamais penser à elle. elle le croise au german, le restau club le plus vip de la ville, une mannequin de l'est à son bras, l'aperçoit parfois lorsqu'elle passe devant le gratte-ciel weiss dans lequel il travaille, ses yeux masqués par la vitre teintée du taxi. quelque chose en lui est dérangeant, triste, navrant. elle le sent sans pouvoir y mettre des mots. quelque chose est absent dans son regard sans lumière tandis que son corps solaire, lui, le rend héliocentrique. tous les yeux s'y accrochent pour s'y brûler la rétine, mais sous l'enveloppe, eva sent que maksim est noir.

depuis qu'elle est en disgrâce, eva vit chez sa tante, dans une maison raisonnablement cossue d'arden park bd. ses soirées, elle les abime dans son lit, devant des séries à la con qui, souvent, la font pleurer. un soir, elle a reçu un texto d'un numéro inconnu. tu veux sortir ? après quelques questions, il a fini par se présenter. c'est maksim weiss.

vêtue de sa meilleure toilette, maquillée à l'extrême en black dahlia, elle est entrée au german à son bras, elle la paria paradant aux côtés du roi soleil. tous les regards se sont tournés vers eux, et elle a aspiré le suc de leur jalousie teintée de sidération avec extase. il lui a dit qu'il était intrigué par elle, par sa chute qu'il a trouvé belle. lui au sommet, géant de deux mètres, a regardé la fleur tombée au pied de l'arbre monde. elle est toute petite, eva, comme un diamant à l'insolente pureté, et d'habitude, elle oblige les autres à se pencher pour lui parler. cette fois, elle a levé les yeux vers lui. il n'aime pas ce monde, lui a-t-il dit. il vient de russie, d'un orphelinat aussi glacial qu'un hiver. solitaire, il n'a jamais aimé que sa mère, peut-être un peu sa soeur, à la rigueur, sa nièce. il est aussi seul qu'elle. toute la soirée, elle a mangé en infimes quantités ce qu'il payait rubis sur l'ongle, comme le veut la tradition, a retenu contre ses dents ce qui brûlait sa langue : pourquoi moi, pourquoi maintenant ? elle craint de ne lui plaire que parce qu'elle est tombée. elle voudrait le berner, le leurrer comme les autres, qu'il voie la reine qu'elle est, le joyau qu'elle est, l'inaccessible idéal. mais d'idéal, maksim n'en a pas. il lui a proposé de monter sur son bateau pour une promenade nocturne, a souri de la voir froncer les sourcils, lui a promis qu'il ne lui ferait pas une melanie. là, sur l'eau sombre, moteur coupé, il lui a dit qu'il aimerait savoir ce que ça fait. d'être elle. étoile écorcée avalée par le ressac.

(credit icon vocivus)

figure quasi emblétique de l'upperclass, eva est désormais sur toutes les bouches : son père est en prison, leur argent confisqué par le gouvernement, chacun se délecte de sa chute, ses amis lui tournent le dos, elle est désormais paria et persona non grata aux réunions de la haute bourgeoisie. n'ayant connu que ça depuis sa naissance, eva ne sait pas vers qui se tourner, entre sauver les apparences qui se craquèlent, gérer son chaos interne et nager pour se maintenir à la surface, elle s'abîme.