Elle était l'emblème d’un Détroit en rémission, le symbole que, malgré les peines et la pauvreté, malgré la gangrène parcourant les rues, malgré les larcins, les arnaques et la terreur qui s’était installée dans plusieurs quartiers, certains continuaient à se battre pour préserver le peu qu’il restait à la ville. Margaret Wood, visage d’actions de bienfaisance, Margaret Wood, poing de velours dans un gant de fer, engagée dans diverses luttes pour faire de son quartier un lieu plus sûr et plus accueillant. Combien sont-ils à avoir profité de son aide ? Sans abris, jeunes à la dérive, anciens prisonniers en réinsertion, orphelins accueillis et accompagnés vers leur nouvelle famille, cette assistante sociale à la retraite n’avait jamais cessé de trimer à la tâche de rendre l’existence de son prochain plus douce.
Visage de l’espoir dans une ville trop morne, trop sombre, elle représentait tout ce que la Mairie souhaitait préserver.
Mais, visiblement, d’autres en avaient décidé autrement.
Car le spectacle offert en plein Trumbull, aux abords du QG des wolves tant comme déclaration de guerre que pistes brouillées pour mener les enquêteurs sur de mauvais coupables tout désignés, était à faire vomir. Exécution sommaire, théâtralité exacerbée, spectacle dégoûtant : la dépouille de Margaret Wood présentée au peuple comme la promesse que rien ne viendra jamais empêcher le mal de se distiller aux artères de la ville. Dans les rues, on s’inquiète, ce n’est pas le premier meutre laissé sans réponse, sans mobile apparent, sans explication, ce n’est pas la première fois que les rues inquiètent, que les enfants sont interdits de quitter la maison une fois la nuit tombée, que même les commerçants se terrent derrière leurs vitrines closes. On pense évidemment avec crainte au tueur aux cartes de tarot, on repense à cette tempête qui a assassiné l’ancien maire mais on ne sait pas mettre un visage sur cette nouvelle menace.
Mais aux souterrains de la ville, à ceux qui connaissent l’envers du décor, un nom se répand, se susurre, se murmure. Les dragons. Discrets depuis quelques années, ils ont commencé à se faire entendre depuis la tempête qui leur a permis de gagner en territoire, profitant du chaos pour investir des commerces et demeures abandonnées, rachetant des parcelles grâce à de l’argent sale, celui de la drogue qui aura coûté la vie de Margaret.
Aujourd’hui, ils ne veulent plus rester dans l’ombre et c’est une déclaration à ciel ouvert qu’ils auront faite : celle que personne n’est à l’abri et que si les organisations de Détroit cherchent à les empêcher d’atteindre leurs objectifs, ils les écraseront aussi.
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